Mais, les Guinéens sont les vraies victimes résignées des conséquences d’un recul démocratique qu’est cette forme de succession imputable à Alpha Condé.
Recevant, en avril 2013 au Palais SEKHOUTOUREYAH à 6 ans et 8 ans de l’échéance, une mission d’inspection de la Confédération Africaine de Football (CAF) venue voir sur le terrain les différents sites retenus et s’enquérir du degré de l’engagement politique des autorités Guinéennes à travers leur numéro 1 par rapport à la double candidature du pays pour l’organisation de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) 2019 ou 2021, le Président Alpha Condé, intenable, se lance, au grand dam de ses interlocuteurs Guinéens et étrangers, dans un spectacle où le manque de volonté et de responsabilité se disputent la vedette en agitant l’incapacité de son régime à saisir l’une des deux opportunités pour la Guinée. Alors que les chefs d’État des autres pays candidats (Alhassane Ouattara de la Côte d’Ivoire, feu Abdel Aziz Bouteflika de l’Algérie, Paul Biya du Cameroun, Joseph Kabila de la R D Congo, Michael Sata de la Zambie) convaincus que la CAN avant d’être une fête continentale est d’abord un facteur de développement intégral ont plaidé les dossiers de candidature de leurs pays avec tout ce que cela comporte comme engagements pour obtenir l’organisation de l’événement, pour la première fois avec le Président Alpha Conde, une mission d’inspection de la CAF acceptait d’inverser les rôles et supplier un Chef d’État d’accepter que son pays postule. Aussi inédit que cela puisse paraître, mais le chef de mission Malien de l’inspection, Amadou Diakité, membre du comité exécutif de la CAF et sa composée de Adoum Djibrine (Tchad), également membre du comité exécutif de la CAF, feu Amr Fahmy (Egypte), directeur du tournoi de la CAN et Paul Bassey (Nigeria), expert de la CAF avec les membres du Gouvernement Guinéen et de la Fédération Guinéenne de Football ont été obligés d’exercer tout leur talent oratoire dans les discours élogieux sinon dytirambiques sur « le leader panafricaniste convaincu, le champion de la jeunesse » pour que l’ancien Feanfiste cède et donne son quitus.
Le jeudi 1er septembre 2022, face à une autre mission d’inspection de la CAF pour le moins dubitatif des capacités de la Guinée à tenir le délai à 3 ans de la CAN 2025, le Colonel Mamadi Doumbouya, s’est engagé auprès de l’instance continentale de Football afin que la Coupe d’Afrique des Nations attribuée à la Guinée ait lieu comme prévu en 2025.
Contrairement au réticent Alpha Conde en 2014 se faisant supplier, le Colonel Mamadi Doumbouya, face aux Inspecteurs qui ont envisagé la possibilité d’un report à 2026 ou 2027, a été si tranchant : »on en a fait une priorité nationale et cette priorité nationale, c’est 2025, et on n’ira pas en 2026 ou en 2027, on l’organisera en 2025′ », que le chef de mission Béninois, Mathurin De Chacus, sceptique face à « la théorie » du ministre des sports, Lansana Bea Diallo, s’est montré totalement conquis : « ll nous a parlé en vrai militaire, il est très déterminé à organiser la Can pour les guinéens. Nous irons rendre compte au président de la CAF (Confédération Africaine de Football) mais nous sommes réellement rassurés par les dispositions déjà prises par la Guinée ».
C’est toute la différence entre les 2 principaux protagonistes du 5 septembre 2021. La réaction ou l’attitude face à cette question de la CAN résume le degré d’intérêt sinon de patriotisme de l’un et de l’autre pour la Guinée.
Mais, entre le vainqueur et le vaincu de ce coup de force qui a fait basculer à nouveau le destin de la Guinée dans l’inconnu, les Guinéens eux restent coincés dans l’incertitude.
En effet, si la grande majorité de la population a été déçue du règne décennal d’un ancien Président démocratiquement élu, legal et légitime au carnet d’adresses riche de plus de 60 ans de combats politiques avec presque toutes les personnalités qui font écrire l’histoire contemporaine du monde, mais
qui a terriblement manqué d’ambitions, de volonté politique pour la Guinée, elle s’interroge sur l’efficacité de la méthode du Chef de la junte.
À l’image de l’organisation de la CAN qui est entrain d’échapper à la Guinée par le fait de l’immobilisme qu’il a adopté dès les premières heures, de son opposition ferme à la construction du chemin de fer Conakry – Kerouané via Kankan, de son refus d’achever et de rendre opérationnel le don chinois du stade de Nongo, de son peu d’intérêt pour le lancement d’une compagnie aérienne nationale, il est pratiquement difficile de soutenir que le Président Alpha Condé, était animé de volition pour la Guinée.
Bien entendu, qu’il est loisible et même juste de louer les progrès réalisés dans le domaine de l’électricité avec une capacité de moins de 200 mégawatts en 2010 à un peu de 500 mégawatts aujourd’hui avec la construction du barrage de Kaléta Souapiti Amaria et le système d’interconnexion frontalière, l’accroissement des activités minières qui a libéré de milliers d’emplois, la rénovation de quelques édifices publics dans une dizaine de préfectures à l’occasion de la célébration tournante des fêtes de l’indépendance nationale, la modernisation de l’hôpital Donka, les voiries urbaines de Conakry et les routes nationales ( qu’il partage désormais avec son tombeur) et même la construction ou la reprise ( bien que ce soient des investissements et capitaux à 100% privés) de 6 hôtels à Conakry.
Mais, on avouera que ce bilan du Président Alpha Condé, essentiellement axé sur les chiffres du FMI et les éternels projets, est infiniment peu pour le genre de Président que les Guinéens espéraient de l’homme politique qui a fait plusieurs fois le tour du monde avant d’accéder à la magistrature suprême, de l’historique opposant lucide et pertinent dans ses diagnostics et critiques de la Gouvernance de la Guinée sous le Général Lansana Conté, rassurant dans ses promesses, d’un Professeur d’université qui n’a pas finalement pu construire une salle de classe ( contrairement à l’autodidacte Responsable Suprême de la Révolution qui a doté la Guinée dans les années 60 de la seule digne Université publique du pays depuis l’indépendance jusqu’à nos jours).
Le 12 octobre 2020, un rapport bilan du Président Alpha Condé constatait que seuls 40 sur 315 engagements et promesses issus du Programme de Gouvernance 2015 – 2020 répartis sur 19 secteurs ont été tenus, soit un taux incroyablement nul de 13%, et 86 promesses et engagements partiellement réalisés soit un autre faible taux de 27 %.
Et pourtant, même un éclair tour de la sous-région pour constater ce que ses homologues et « petits » du Niger, Mahammadou Issoufou, du Mali, feu Ibrahima Boubacar Keïta ( présents à sa campagne en 2010) venus après lui au pouvoir ont réalisé en matière d’infrastructures routières, sanitaires et autres suffit pour se rendre compte de l’ampleur du gâchis. Au Niger, par exemple pour ne pas citer le Président Ouattara, arrivé au même moment au pouvoir que son frère Guinéen, et qui a fait de l’électrification et de l’aduction d’eau une réalité de 100% dans toutes les localités de Côte d’Ivoire sans évoquer les nombreux CHU et CHR rénovés ou construits, les grandes routes et voiries urbaines construites partout en Côte d’Ivoire ou encore la création de la compagnie Air Côte d’ivoire, le Président Issoufou, en 10 ans, a laissé un bilan de plus de 2 000 km de routes bitumées, 1000 km réhabilitées, 3 000 pistes rurales construites, 900 km réhabilitées, trois hôpitaux de référence ultra-modernes à Niamey, Zinder et Tahoua, le lancement du projet ferroviaire de réhabilitation du chemin de fer Niamey – au port de Cotonou via Lomé sur plus de 700 km, l’electrication, la construction des marchés modernes, aéroports, stades, arènes de jeux, places publiques dans les chefs lieu de régions du Niger etc.
Nul besoin de charger davantage l’ancien Président en énumérant les gigantesques réalisations d’un autre Chef d’État élu après lui, en l’occurrence le Président Macky Sall du Sénégal mais on notera les actions récentes de ce dernier notamment le réseau ferroviaire avec le Train express régional (TER) reliant Dakar à Diamnadio et le stade olympique Abdoulaye Wade de 50 000 places initié, conçu et construit en seulement 2 ans.
N’ignorant pas ces réalités, les Guinéens, en se réjouissant et ses partisans par leur indifférence par rapport à sa chute, le 05 septembre 2021, signifient qu’ils n’ont pas tiré profit de la Gouvernance de l’homme auxquel ils croyaient et sont de ce fait conscients de l’échec global d’Alpha Condé. Ce dernier a fait du pouvoir un moyen de jouissance personnelle en se servant sans limite dans les caisses de l’Etat, en prenant plaisir dans des promenades incessantes et coûteuses pour le budget national à travers le monde sans impact réel dans le développement socio-économique du pays. Alpha Condé s’en était d’ailleurs aperçu et très rapidement quand il a instruit le bureau de presse de la Présidence de la République de ne plus publier les communiqués relatifs à ses interminables et parfois improvisés voyages à l’extérieur. Même durant les moments violents et sanglants des marches et manifestations régulières de la coalition de l’opposition pour la finalisation de la Transition durant son premier mandat, le Président Alpha Condé n’a jamais quitté l’air, pour prendre un temps soit peu une pause au sol afin de trouver une solution à la crise politique et mettre fin aux violences qui endeuillaient la Guinée.
Par rapport à tous ces faits et bien d’autres illustratifs de la mauvaise gouvernance, le 05 septembre 2021 et son lot d’humiliations represente pour l’ancien Président une sortie par la fenêtre. Même si le rêve est permis, il est pratiquement impossible de trouver une majorité regrettant la Gouvernance Alpha Condé encore moins souhaitant son retour.
Cependant, à travers le dernier article de JA sous la signature de l’éternel marchand de la plume, François Soudan, Alpha Condé affiche sa vraie nature, prouvant qu’il n’a ni changé ni évolué d’un iota. Chasser le naturel, il revient au galop.
Comme toujours, il n’a d’intérêt que pour sa propre personne.
Son obstination à réclamer actuellement les 30 millions USD offerts par l’actuel Monarque Saoudien, Salmane ben Abdelaziz Al Saoud exprime à suffisance cette autolatrie du Président Alpha Condé totalement contraire à la personnalité d’homme d’Etat, à la notion d’Etat, au patriotisme et à l’altruisme de feu Président Ahmed Sekou Touré qui, dans les années 70, a publiquement versé dans les caisses du Trésor public les 10 millions USD offerts par le troisième Souverain Saoudien, le Roi Fayçal Ben Abdelaziz Al Saoud au Président de la République de Guinée dont il était.
C’est cet egotisme à l’excès qui l’a aveuglé à ne vouloir voir aucun cadre Guinéen ni dans son parti ni ailleurs capable d’éviter à la Guinée les angoisses de son affreux 3ème mandat. Finalement, l’histoire ne retiendra pas non plus que le mémorable opposant qui a caché sa longue lutte politique derrière des valeurs et vertus louables n’a pas été non plus un Président démocrate.
Même si le tombeur ne semble pas en faire un motif, n’eut été l’inextinguible soif du pouvoir absolu du déchu, la probabilité du putsch du 05 septembre 2021 aurait été minime contre un nouveau Président élu dans la transparence.
Manifestement, le réfugié d’Istanbul ne semble pas avoir compris la leçon que l’histoire lui a administré à moindre coût avec son exil doré au moment où ses anciens compagnons et collaborateurs croupissent en prison ou placés en résidence surveillée, privés de liberté, passeports confisqués, interdits de quitter le pays, comptes bloqués.
Au delà d’être insensible à l’épreuve que traversent ceux-là qu’il désigne comme seuls responsables et coupables des maux et crimes reprochés à son règne, Alpha Condé, avec son nègre de service François Soudan alimenté durant les 11 dernières années par l’argent du contribuable Guinéen et qui continue de se servir dans l’épargne de l’employeur, se donne le beau rôle, se couvre d’une nouvelle virginité, falsifie un bilan que les Guinéens n’ont nullement ressenti, et profite pour afficher enfin ses vraies intentions. Celles, l’arbre ne peut pas cacher la forêt, celles de revenir aux affaires. Pour ceux qui le connaissent, cette ambition, celle dévolue à son rayonnement personnel, habitera toujours Alpha Condé tant qu’il respire. Pour ceux qui en ont douté, il est désormais évident que son truc de « Comité provisoire » qui a semé la zizanie entre les dirigeants de son parti était loin d’être sincère. Il ressemblait beaucoup plus à une peau de banane sur laquelle l’ancien Premier ministre, Ibrahima Kassory Fofana a glissé vers Coronthie qu’un véritable choix politique porté sur l’ancien Président de GPT dissout pour le leadership du parti unifié, le RPG-ARC-EN-CIEL. Bref, ce leadership, Alpha se le réservera toujours même à l’au-delà.
Un an après le départ de son prédécesseur, le Colonel Mamadi Doumbouya ne bénéficie pas non plus d’un blanc seing de la part de ses compatriotes abusés et fatigués des pouvoirs successifs.
La qualification internationale des coups d’état et les nombreux défis, face au lourd passif socio-économiques hérité, rendent complexes ses marges de manœuvres très réduites et très délicates.
Les discours tenus et quelques actes posés depuis mettent en relief sa volonté et son patriotisme.
Mais, le véritable challenge pour lui est de ramener la Guinée, saine et sauve, dans le concert des pays normaux. Car sa détermination, son énergie et même son patriotisme ne suffiront pas à créer le bonheur qu’il semble vouloir pour les Guinéens dans ce nouvel environnement international qui exige que les pouvoirs soient légaux et légitimes pour être efficaces. Après l’aboulie d’Alpha Condé, il est nécessaire que la Guinée ne souffre pas encore de l’impuissance du Colonel Doumbouya du fait de son statut actuel.
Il est donc impératif d’accorder la priorité au retour à l’ordre constitutionnel sans pour autant reléguer au second plan encore moins abandonner la lutte de la moralisation de la vie publique.
Après tant d’années de malversations et de gabegies pour reprendre le Président du CNRD lui-même, mais aussi de violences politiques meurtrières, il est fondamental de situer les responsabilités des uns et des autres avant de repartir avec de nouvelles bases. En fixant, avec l’approbation du peuple, les critères d’éligibilité applicables à tous les prétendants sans exclusif. Sur ce point, ni le CNRD, ni le FNDC, ni les partis politiques, la société civile encore moins les organisations régionales, africaines et internationales ne peuvent déterminer encore moins choisir à la place des Guinéens eux-mêmes les futurs dirigeants qu’ils veulent à la tête de leur pays, la Guinée.
Abdoulaye Condé
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Last modified: 5 septembre 2022